LINKY : pas de sanctions discriminatoires !
Contrairement à ce qu’ont affirmé plusieurs médias, la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) renonce, au moins jusqu’en 2025, à faire payer la relève des compteurs
aux usagers qui refusent Linky, à condition qu’ils transmettent leur consommation.
La CRE, instance pas vraiment indépendante du pouvoir [1], reconnaît qu’à la fin 2021 environ 10% des compteurs électriques en service ne sont pas des Linky, soit 3,8 millions [2]. C’est indiscutablement le signe que le mouvement Stop Linky a rencontré un écho très large puisque, au-delà de celles et ceux qui les ont refusés, bien d’autres ont dû subir des installations forcées et en demandent la dépose.
Cependant, la CRE continue de nier les souffrances des personnes électro- hypersensibles, liées à l’emploi du CPL (courant porteur en ligne) par les Linky. La CRE ignore les coûts économiques et écologiques exorbitants de ce programme [3], et l’utilisation commerciale et sécuritaire des données collectées (voir exemples de radiation de Pôle emploi [4], ou de signalement pour non respect du confinement [5]).
Mais l’État et Enedis, suivis en cela par la CRE, poussent pour sanctionner le “comportement” de ceux qui ont refusé la pose d’un Linky. Ainsi, la CRE prévoit [6] la mise en place d’une sanction financière de 8,30 € tous les deux mois (49,80 € par an) pour ceux qui n’ont pas de Linky ET qui ne mettraient pas à disposition d’Enedis leurs index de consommation (ce qui veut dire que, a contrario, s’ils fournissent leurs index, ils ne seront pas “sanctionnés”).
Par cette disposition, Enedis, en transférant la charge de la relève aux usagers, allège ainsi ses obligations de service au public, avant la privatisation envisagée par le pouvoir pour l’après présidentielle [7].
Pour ces usagers, c’est un poids financier potentiel de plus alors que ceux-ci doivent déjà faire face à la flambée des prix de l’énergie, et que 12 millions de foyers peinent à payer leurs factures, soit 20 % de la population [8]. Le médiateur de l’énergie [9] souligne une augmentation de près de 17% des interventions pour impayés. Celles-ci aboutissent à une suspension de la fourniture d’électricité ou, désormais, à une limitation de puissance du compteur qui ne permet que de s’éclairer, mais plus de se chauffer ni d’avoir de l’eau chaude [10]. Ce sont des atteintes inadmissibles aux droits élémentaires et à la dignité.
Par ailleurs, une note d’Enedis (envoyée en février 2022) révèle que les usagers équipés de Linky doivent aussi communiquer leurs index pour “fiabiliser les informations” transmises par ce compteur. Pourquoi viser alors les seuls usagers non équipés de Linky ?
Les collectifs et associations opposés au Linky demandent la levée de ce dispositif discriminatoire ainsi que la restauration d’un service public de l’énergie qui assure aux usagers un accès universel à ce bien commun.
Ils décident de contester cette délibération par des recours gracieux auprès de la CRE.
[1] Composition de la Commission de Régulation de l’Energie : 5 membres nommés par le Président de la République (pour le Président de la CRE), par les Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat et par les ministres de la transition énergétique et de l’Outre-mer.
[2] CRE : consultation publique du 25 novembre 2021
[3] Rapport de la Cour des Comptes du 7 janvier 2018
[4] Un chômeur a été radié de Pôle Emploi, son compteur Linky révélant qu’il n’était pas à son domicile
[5] Le maire de Nice demande l’utilisation des Linky pour détecter la fraude aux règles du confinement
[6] Délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 24 février 2022
[7] Attac : analyse du projet “Hercule”
[8] Reporterre : 12 millions de français confrontés à la précarité énergétique
[9] Médiateur de l’énergie : des interventions pour impayés en hausse en 2021